jeudi 31 mai 2007

L'opinion de la vice-présidente de l'Assemblée nationale

Les manifestations ont continué cette semaine dans les deux camps. L’opposition a mobilisé, surtout par son mouvement étudiant, tous les jours depuis dimanche. Ce mardi, les étudiants bolivariens ont manifesté en soutien à la décision du gouvernement ainsi qu’en faveur de la nouvelle chaîne de télévision TEVES (qui remplace RCTV sur le canal 2) et une autre grosse manifestation de soutien est prévue pour ce samedi.


Photo : Seb

La vice-présidente de l’Assemblée nationale, Désirée Santos Amaral, à la tribune lors de la séance plénière de ce mardi.

Dimanche dernier, quelques heures avant la fin du signal d’émission de RCTV, j’ai recueilli les impressions de la vice-présidente de l’Assemblée nationale (ndlr : le Parlement), Désirée Santos Amaral. Je reproduis ici ses déclarations :

"Cette décision est un pas en avant. Nous pensons que la naissance d’une télévision de service public au Venezuela va marquer un avant et un après dans la communication. Et nous avons l’espoir que la programmation de cette nouvelle chaîne va donner l’exemple, au Venezuela et au monde, de ce que signifie vraiment une télévision de service public. Une télévision dans laquelle nous pourrons tous nous voir, dans laquelle réellement le message et le média se différencient, qu’ils ne soient pas dans les mêmes mains. Une télévision où les producteurs nationaux indépendants, les créateurs vénézuéliens, auront l’opportunité d’offrir toute la gamme de programmes qui leur ont toujours été refusés dans les médias commerciaux."

A propos du renouvellement des concessions d’autres chaînes privées (1) par la CONATEL (2), la vice-présidente a estimé que "cela démontre que la décision par rapport à RCTV n’a rien avoir avec la politique. Parce que si cela avait été politique, nous aurions révoqué les concessions le 14 avril (ndrl : date du retour du président Chávez à son poste après le coup d’Etat du 11 avril 2002). Toutes, car ils ont tous participé au coup d’Etat (3). Si cela avait été une vengeance, nous aurions pris une décision et personne n’aurait parlé de vengeance à ce moment là, parce qu’une révocation de concession aurait été amplement justifiée."

Elle a rappelé que "cependant, le président Chávez lui-même l’a dit dans son message, au retour de l’enfermement dans lequel il a été maintenu durant 46 heures. A ce moment-là, il invite les propriétaires des médias privés à réfléchir. Il les invite à construire un pays meilleur, il ne les sanctionne pas. Si nous avions pris cette mesure le 14 avril, aucun d’entre eux n’aurait pu dire quoi que ce soi, parce qu’eux-mêmes s’attendaient à ce qu’on leur révoque la concession. Leur participation dans le coup d’Etat avait été tellement évidente, qu’eux-mêmes pensaient qu’on allait les sanctionner."

"Le fait que maintenant on ne renouvelle pas la concession de RCTV alors qu’on le fait avec Venevisión démontre que cela n’est pas une situation politique, que ce n’est pas une vengeance. Le fait est que la portion du spectre radioélectrique qu’occupe RCTV est la plus importante de toutes. C’est la partie du spectre la plus adéquate pour une télévision de service public et pour que tout le pays puisse profiter d’une télévision différente, sans aucun doute" a expliqué Désirée Santos Amaral.

"C’est la meilleure portion du spectre radioélectrique pour mettre en marche un rêve qu’à caressé la société vénézuélienne depuis de nombreuses années. Je suis certaine que les autres chaînes commerciales vont s’adapter car il va y avoir de la concurrence. Il n’y aura pas de monopole ni d’oligopoles, il y aura une véritable concurrence. Et eux, en fonction de cela amélioreront leurs programmes. C’est mon désir et j’y mets toute ma confiance, pour qu’on puisse y voir tous les visages."

Elle a finalement ajouté "et je dis aux secteurs de l’opposition, à ces gens qui utilisent la liberté d’expression pour dire qu’il n’y a pas de liberté d’expression au Venezuela, ce qui est une contradiction ; je leurs dis qu’ils continuent à utiliser la liberté d’expression pour dire ce qu’ils veulent. Mais qu’ils le fassent en respectant les lois de la République. Parce que s’ils essaient de porter atteinte à la démocratie, au projet bolivarien, s’ils essaient de porter atteinte à la stabilité et à la paix au Venezuela, nous réagirons. Alors je leur répète : attendez votre tour, attendez les prochaines élections et osez y participer (4) mais d’ici là, maintenez-vous dans le cadre de la loi."


(1) Et notamment de Venevisión, qui a également joué un rôle actif lors du coup d’Etat d’avril 2002.

(2) Commission nationale des Télécommunications

(3) Lire aussi (M.) Lemoine, "Dans les laboratoires du mensonge au Venezuela", Le Monde Diplomatique, août 2002, http://www.monde-diplomatique.fr/2002/08/LEMOINE/16761

(4) Par ce "osez y participer", Madame Amaral fait référence aux élections législatives de décembre 2005 qui avaient été boycottées par l’opposition, ce qui permit aux partis chavistes de remporter la totalité des sièges.

mardi 29 mai 2007

Après avoir tombé le rideau, RCTV occupe le devant de la scène

La manifestation convoquée samedi par l’opposition s’est déroulée sans heurts. Elle s’est terminée devant le siège de RCTV en milieu d’après-midi. Ce dimanche, les choses se sont corsées quelque peu. Les partisans du président Chávez, qui appuient la décision de l’Exécutif de ne pas renouveler la concession de RCTV, avaient appelé à la manifestation de soutien dès 11h. Des concentrations ont eu lieu à différents points de Caracas et ont convergé vers le théâtre Teresa Carreño où les manifestants ont fait la fête en attendant l’entrée en fonction du nouveau canal TEVES (Télévision vénézuélienne sociale), ce lundi à 00h01.

De son côté, l’opposition à continué les mobilisations, dont certaines se sont terminées en échauffourées avec la police. Dans la matinée les supporters de RCTV ont commencé à se regrouper. Mais le grand rendez-vous était prévu dans l’après-midi. Leur intention étant de se maintenir en alerte toute la nuit, il ne fallait pas commencer trop tôt.


Photo : Seb


Début de soirée devante le siège de RCTV

Vers 18h, des manifestants hostiles à la décision du gouvernement se sont affrontés aux forces de l’ordre devant le siège de la CONATEL (Commission nationale des Télécommunications). On a parlé durant un moment d’un policier blessé par balle. Mais ce lundi le journal Ultimas Noticas démentait l’information, citant une source de la Police métropolitaine. Toujours selon le quotidien, une enquête sera malgré tout ouverte par Parquet. Il y a de nouveau eu du grabuge vers 21h au même endroit.


Photo : Seb


Marcel Granier, big boss de RCTV accompagné de Miguel Angel Rodríguez (à gauche), animateur vedette de la chaîne, quelques instants après la coupure du signal.

De mon côté j’ai passé la soirée et une partie de la nuit face au siège de RCTV. Malgré un contact la veille avec la responsable de presse afin d’obtenir une accréditation, l’accès à l’intérieur du bâtiment m’a été refusé. C’est donc sur l’écran placé à l’extérieur que j’ai vu le signal de RCTV s’éteindre à 23H59 et apparaître le logo de TEVES. Quelques minutes après, l’ambiance a commencé à s’échauffer et les projectiles n’ont pas tardés à voler en direction des forces de l’ordre. La police a alors répliqué et dispersé la manifestation (qui a cette heure là n’était déjà plus très compacte). Petit accrochage sans grande incidence, le calme est vite revenu. Lorsque j’ai quitté les lieux vers 01h30, tout était calme et une petite cinquantaine de personnes continuait sur place en criant des slogans.


Photo : Seb

Après minuit, quelques manifestants ont lancé des projectiles en direction de la police.


Ce lundi les manifestations ont continué en ville, pour la plupart l’œuvre d’étudiants provenant d’universités privées et de l’Université centrale du Venezuela. Mais il est clair que les mobilisations ne sont pas terminées et risquent de continuer durant la semaine.

Le Venezuela vu de chez nous

J’ai lu un peu les médias extérieurs sur le net. Je dois dire qu’ils n’y vont pas de main morte. A les lire, je devrais avoir peu qu’on me coupe bientôt l’accès à internet…

Je pense que le commentaire posté par Antoine sur le blog est une bonne occasion de faire la lumière sur certains points. Et on peut se baser sur l’éditorial du Monde du 26 mai (cité par Antoine) pour corriger quelques affirmations mensongères. (1)

Le Monde affirme : "Vendredi 25 mai, l'armée a reçu l'ordre de la Cour suprême de prendre le contrôle des bâtiments et installations de RCTV". Parciellement faux. La Salle constitutionnelle du Tribunal suprême de Justice (TSJ) a ordonné à l’armée de protéger et contrôler les installations et équipements, telles les tours et antennes de diffusion disséminées sur le territoire national. Ceci afin de "garantir un service public universel de télécommunication" et "de maintenir une structure opérationnelle suffisante ou adéquate qui permette une efficace pénétration, accès et accessibilité". Le TSJ se base sur l’article 108 de la Constitution qui stipule que "l’Etat garantira des services publics de radio, télévision (…) afin de permettre un accès universel à l’information". Par cette décision, le TSJ s’assure que la nouvelle chaîne TEVES disposera de "l’infrastructure nécessaire pour la transmission au niveau national, dans des conditions de qualité."

Il ne s’agit donc pas d’un contrôle des bâtiments proprement dits (studios de production, matériel audiovisuel, etc.) mais bien du contrôle des antennes qui permettent la diffusion en VHF sur le territoire national. La direction de RCTV invoque une violation de la propriété privée. Mais l’arrêt rendu par le TSJ (2) se base sur une résolution de novembre 1973 qui affirme : "Les installations nécessaires seront construites par Radio Caracas C.A. à ses seuls frais. Tant le terrain, comme les tours et constructions qui s’y installent, se considéreront propriété exclusive de la République et dans ce sens, la compagnie autorisée devra octroyer les instruments juridiques nécessaires."

Le Monde poursuit : "Lundi 28 mai, il ne restera plus qu'une chaîne d'opposition, dont le signal ne dépasse pas Caracas et dont l'audience est négligeable." Totalement faux. Premièrement, Globovisión (la chaîne dont parle Antoine dans son commentaire) dispose d’une diffusion nationale. Deuxièmement, elle est loin d’être la seule chaîne d’opposition. Les principales chaînes privées diffusant sur une vaste partie du territoire national sont Globovisión, Venevisión (appartenant au groupe du magnat de la presse Cisnero, qu’on peut difficilement taxer de chaviste) ainsi que Televen, sans compter toutes les chaînes régionales.

Selon les chiffres du ministère de la Communication et de l’Information, au 26 janvier 2007 le spectre radioélectrique se divisait de cette façon : En VHF, 78 % des chaînes étaient aux mains du secteur privé contre 22 % pour le secteur public. En fréquence UHF, 82 % des opérateurs étaient privés, 11 % communautaires et seulement 7 % publics. (3)

On peut également signaler que le 27 mai, la CONATEL a renouvelé quatre concessions qui prenaient fin à la même date. Il s’agit de la chaîne publique (Venezolana de Televisión) et de trois privées (Venevisión, Televisora Andina de Mérida et Amavisión).

A ce sujet, j’ai interrogé la vice-présidente de l’Assamblée nationale ce dimanche. Je publierai la traduction de ses commentaires dès demain.

(1) Censure à la Chávez, Le Monde, samedi 26 mai 2007, http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0@2-3232,36-915304@51-897252,0.html

(2) Vencimiento de la concesión de RCTV no puede significar una desmejora del Servicio Público, 25 mai 2007, http://www.tsj.gov.ve/informacion/notasdeprensa/notasdeprensa.asp?codigo=4808

(3) Ces données sont disponibles dans le Libro Blanco sobre RCTV, téléchargeable sur le site du ministère, http://www.minci.gob.ve/

samedi 26 mai 2007

Ambiance tendue à Caracas

Cela fait maintenant plusieurs jours que je n’ai plus posté d’article. Je dois dire que cette semaine a été assez chargée et traduire quelques dépêches de Notisur m’aurait pris trop de temps. J’ai donc décidé de concentrer l’activité de cette semaine en un seul texte.

Si je n’ai rien mis en ligne, on ne peut pas dire pour autant qu’il ne s’est rien passé, au contraire. Dès lundi, l’opposition a commencé à se mobiliser pour protester contre la non rénovation de la concession de la chaîne privée Radio Caracas Televisión (RCTV). En effet, la concession de la fréquence VHF accordée à RCTV prend fin ce dimanche 27 mai à minuit et le Gouvernement a décidé de ne pas la renouveler (lire l’article sur ce blog "Les médias militants de la droite vénézuélienne").

Cette chaîne de télévision est active depuis près de 50 ans et la dernière rénovation de concession remonte à 1987. L’opposition et les médias privés (particulièrement "proches" l’un de l’autre) parlent de "fermeture d’un média". Pourtant, les infrastructures de RCTV resteront intactes et la chaîne pourra continuer à fonctionner par câble ou par satellite. Une grande partie de ses recettes provenant de la vente de "telenovelas" (séries télévisées typiquement latino-américaines) au Venezuela et à l’étranger, le groupe 1BC propriétaire de RCTV pourra continuer ses affaires.


Photo : Seb

Bien que les médias privés se prétendent tous "neutres" ils affichent souvent plus qu’ostensiblement leur orientation politique. Ici lors d’une des manifestations en soutient à RCTV le 21 avril dernier, les drapeaux des partis d’oppositions ouvraient la marche. Sur la photo, des partisans du parti d’opposition Primero Justicia.


Evidemment cette même opposition et ces mêmes médias privés invoquent la "liberté d’expression", la "démocratie", etc. Toute sorte de principes qu’ils ne se sont pas gênés de violer lorsqu’ils ont pris le pouvoir par un coup d’Etat en avril 2002. En à peine 48 heures, durant lesquelles ils se sont maintenus au pouvoir, les putschistes avaient suspendu toutes les garanties constitutionnelles, fermé la chaîne de télévision publique Venezolana de Televisión (VTV) ainsi que plusieurs médias communautaires et commencé une féroce répression dans les quartiers.

Bref, je m’éloigne. Pour en revenir à cette semaine. Lors de la manifestation de lundi, j’ai pu recueillir les commentaires d’Oscar Pérez, dirigeant d’une organisation anti-chaviste qui se fait appeler le "Commando National de la Résistance". Voici quelques extraits des déclarations d’Oscar Pérez :

"Chávez est train de mettre le Venezuela sur un baril de poudre qui va exploser à n’importe quel moment. Ensuite, qu’il n’aille pas faire le tour du monde à la recherche de solidarité, en disant qu’ici on a conspiré un coup d’Etat contre lui. Car le seul déstabilisateur en ce moment au Venezuela c’est Hugo Chávez".

… pas de liberté d’expression disaient-ils ?

Et le meilleur reste à venir :

"S’il se produit une escalade de violence au Venezuela dans les heures qui viennent, le seul responsable sera Hugo Chávez. Et il est important que le monde le sache, il est important que la planète sache que Chávez joue de nouveau avec la violence" affirmait Oscar Pérez.

Lorsque je lui demandais s’il fallait y voir un quelconque message dissimulé, il me répondit : "C’est une prémisse, c’est ce que je pense. Et j’assume ma responsabilité d’appeler les gens à occuper la rue".

Le discours de Monsieur Pérez s’est un peu modéré ce vendredi. Lors d’une conférence de presse hier après-midi il a adopté un ton plus pacifique, appelant les gens à manifester ce samedi dés 10h "de façon pacifique mais ferme".

Je vais couvrir la manifestation pour Notisur, on verra ce que ça donne. Elle partira du centre de Caracas pour se terminer devant le siège de RCTV en soutien à la chaîne.

Dimanche soir, l’opposition a prévu une autre manifestation qui devrait durer toute la nuit. Le lundi dés 00h01, RCTV ne devrait plus disposer de son signal VHF. A cette heure là une nouvelle chaîne de télévision, publique celle-là, prendra le relais. Son nom : TEVES, Televisora Venezolana Social (1). Elle aura pour but de diffuser des programmes culturels, du divertissement, etc. Avec un accent particulier sur la culture vénézuélienne et les productions nationales.

De leur côté, les partisans du "proceso" (2) et de la non rénovation de la concession ont également prévu leurs manifestations. Ils célèbreront l’événement durant la nuit de dimanche à lundi. Et une intervention de Chávez est prévue le dimanche soir au Théâtre Teresa Carreño, à Caracas.

Cette semaine, l’Assemblée nationale a voté une résolution appuyant la décision de l’Exécutif de ne pas renouveler la concession de RCTV et soutenant également la création de la nouvelle chaîne TEVES. La plénière ne s’est non pas réalisée dans l’hémicycle comme cela se fait habituellement mais en rue. Le droit de parole a été donné à différentes personnes (ministre de la Communication, députés, artistes, membres de médias communautaires, etc.). C’est ce qu’on appelle ici "el parlamentarismo social de calle" (le parlementarisme social de rue).

Voilà, c’est la première publication avec une touche plus personnelle sur ce blog. C’est un style peut-être moins journalistique mais qui je pense se prête mieux au concept du blog. Cela ne veut pas dire que je publierai plus d’articles proprement dits mais j’ai l’intention de recourir plus souvent à ce style d’écriture. Je trouve ça plus sympa et plus direct. A vous de me dire ce que vous en pensez…

(1) C’est également un jeu de mots, "te ves" en espagnol veut dire "tu te vois". Symbolisant ainsi l’idée d’une télévision mettant l’accent sur une programmation vénézuélienne, "pour les vénézuéliens et par les vénézuéliens", une télévision qui "reflète la population".
(2) Proceso en espagnol veut dire processus. C’est une façon de désigner le "processus révolutionnaire" en cours, "el proceso".

lundi 21 mai 2007

Caracas s'endort

Photo : Seb

La nuit tombe sur le quartier de Manicomio, dans lequel j'ai emménagé il y a de cela deux semaines. Manicomio en espagnol signifie asile. Le "barrio" s'étend en effet aux alentours d'un hôpital psychiatrique. Le mot "barrio" désigne les quartiers populaires situés sur les collines entourant Caracas.


Photo : Seb

A la base, ces quartiers étaient constitués de "ranchos", maisons en tôles ou en bois construites par les émigrés des campagnes venus chercher du travail à la capitale. Avec le temps, ces constructions se sont consolidées. Les "barrios" se caractérisent actuellement par des maisons aux murs de briques rouges le plus souvent à nu, imbriquées les unes sur les autres au fil de rues étroites et escarpées.


Photo : Seb

Vue panoramique sur le quartier populaire du 23 de Enero, depuis la terrasse d'une voisine à Manicomio. On distingue les lumières des blocs qui caractérisent le 23 de Enero. Le quartier tire son nom du 23 janvier 1958, date de la chute du dictateur Marcos Pérez Jiménez (1948-1958), dans laquelle les habitants de la zone avaient joué un rôle important. Sa position, à deux pas du Palais présidentiel de Miraflores, lui confère en effet un rôle stratégique. Certains habitants du quartier vont même jusqu'à affirmer (non sans une certaine fierté) que "celui qui contrôle le 23 de Enero, contrôle Miraflores". Aujourd'hui l'endroit conserve sa réputation de "quartier combatif et militant" avec ses différents collectifs, organisations, radio communautaire, etc.


Photo : Seb

Après la chute de Pérez Jiménez, deux partis vont se partager le pouvoir et dominer la vie politique vénézuélienne durant 40 ans. Il s'agit d'Action démocratique (sociaux-démocrates) et de Copei (droite). Le 31 octobre de la même année les deux formations signent le pacte de Punto Fijo qui garantira l'alternance entre les deux partis durant 4 décennies, jusqu'à l'élection de Hugo Chávez, le 6 décembre 1998.

mercredi 16 mai 2007

L'économie vénézuélienne atteint une croissance de 8,8%

Nuit illuminée dans le quartier de Sabana Grande (Photo : Seb)

Le ministre du Pouvoir populaire pour la Planification et le Développement, Jorge Giordani, a annoncé ce mardi une croissance de 8,8 % du produit intérieur brut vénézuélien durant le premier trimestre de l'année 2007, selon les chiffres présentés par la Banque centrale du Venezuela (BCV). Cette croissance se reflète également sur le taux de chômage qui est quant à lui descendu à moins de 9 % selon l'Institut national des Statistiques. Durant la conférence de presse au Palais de Miraflores, le ministre Giordani a également réclamé la démission du président de la Banque mondiale, Paul Wolfowitz, impliqué récemment dans une affaire de corruption.

Caracas, 15 mai (NOTISUR) – "L'économie vénézuélienne n'avait plus connu une telle croissance, forte, soutenue et généralisée, depuis ces 50 dernières années" a affirmé ce mardi le ministre du Pouvoir populaire pour la Planification et le Développement, Jorge Giordani.

D'après les chiffres de la BCV, l'économie maintient une croissance continue depuis 14 trimestres. Le ministre a expliqué que "pratiquement 86 % de cette croissance, au premier trimestre 2007, correspond au secteur non pétrolier privé. Et près de 93 % au non pétrolier public et privé".

Le ministre a également rappelé que cette croissance a des répercutions sur le taux de chômage qui, selon les dernières estimations de l'Institut national des Statistiques, atteignait 8,8 % en avril 2007. Selon Jorge Giordani, "on peut espérer atteindre un taux proche des 7 % pour la fin de l'année".

Quant à l'inflation, elle atteignait une valeur accumulée de 4,1 % en avril dernier.

Photo : Seb

Le développement d'un réseau moderne de voies ferrées à travers le pays est l'un des investissements dans le secteur "non pétrolier public", mené par l’intermédiaire de l'IAFE, Institut autonome de Chemins de Fer de l'Etat.

La sortie du FMI

Quant à l'éventuelle sortie du Venezuela du Fond monétaire international et de la Banque mondiale, le ministre a rappelé que "la décision est entre les mains du président Chávez" qui a "tout à fait raison de faire ce genre de commentaires".

Interpellé sur les conséquences d'une telle sortie, Giordani a affirmé que "le Venezuela n'a jamais suivi les consignes du FMI, même pas le 2 février 1999 (ndlr : jour de l'entrée en fonction du président Chávez). On nous disait en 1999 que si le Venezuela ne suivait pas ces consignes, il allait échouer. Le pays a connu une croissance relativement modérée de 3,6 % en 2000 et 2001".

Le coup d'Etat du 11 avril 2002 et la grève patronale qui s'est étendue du mois de décembre de la même année à janvier 2003 (66 jours), ont plongé le pays dans une grave crise économique entraînant une chute de 9 % du PIB. "Le tsunami du coup d'Etat a coûté, selon certaines estimations, plus de 13 000 millions de dollars" a rappelé le ministre lors de la conférence de presse.

Celui-ci a cependant réaffirmé que "le Venezuela a toujours fait honneur à ses engagements, même dans les pires conditions. Et l'histoire du pays le démontre. Seulement, le président n'a jamais été d'accord avec les politiques néolibérales. Et que reste-t-il aujourd'hui de ces organismes ? Regardez la triste figure du président de la Banque mondiale. Qui peut encore le défendre aujourd'hui?"

Le président de la Banque mondiale, Paul Wolfowitz, est actuellement dans la tourmente pour avoir ordonné une augmentation du salaire de sa compagne, Shaha Riza, employée dans la même institution. Faisant référence à cette affaire, Jorge Giordani a affirmé que Monsieur Wolfowitz "devrait avoir honte. Il devrait démissionner immédiatement car il n'a plus aucune autorité morale. Ce représentant qui a été capable de mener l'Irak à un génocide (1), représente maintenant les intérêts les plus obscurs de l'impérialisme nord-américain (2). Les autres peuples du monde devraient réagir face à l'initiative du président Chávez qui, cela ne fait aucun doute, a toujours maintenu une politique audacieuse".

"Je ne sais pas de quelle autorité morale jouissent encore ces messieurs pour définir des politiques qui ont amené la misère humaine dans les pays les moins développés. Maintenant la balle est dans l'autre camp, que Monsieur Wolfowitz démissionne!" Le ministre a assuré affirmer cela sous son "entière responsabilité, en tant que responsable que je suis devant la Banque mondiale, désigné par le président Chávez".

(1) Avant d'entrer en fonction à la Banque mondiale en 2005, Paul Wolfowitz a été l'un des principaux partisans de la guerre contre l'Irak, en tant que Secrétaire d'Etat adjoint à la Défense de l’administration Bush.

(2) Le président de la Banque mondiale est nommé par les Etats-Unis, principal actionnaire de l'institution dont le siège se trouve à Washington. En échange, les Européens choisissent le dirigeant du Fond monétaire international.

samedi 12 mai 2007

Le Prix Nobel de la paix reçu à Caracas

Photo : Seb pour NOTISUR


Ce vendredi, le président Chávez recevait au Palais présidentiel de Miraflores l'économiste bangladais et Prix Nobel de la paix 2006, Muhammad Yunus. Celui-ci s'est vu remettre l'Ordre du Libérateur, la plus haute décoration honorifique du Venezuela. Après s'être réuni dans la matinée avec le leader bolivarien, Yunus a déclaré avoir découvert "de nombreuses similitudes de pensée" entre les deux hommes. Le président vénézuélien a quant à lui réaffirmé son intention de ne pas toucher à la propriété privée, "je suis ici depuis huit ans, je l'aurais déjà fait" a-t-il rappelé.

Caracas, 12 mai (NOTISUR) - "Nous avons eu un bonne discussion et nous avons découvert de nombreuses similitudes dans notre façon de penser. Cela nous uni car nous croyons en une chose commune, créer un monde libéré de la pauvreté" a commenté le Prix Nobel de la paix 2006, Mohammad Yunus, après s'être réuni avec le président.

Dans son intervention, après avoir reçu l'Ordre du Libérateur des mains du mandataire vénézuélien, l'économiste bangladais a affirmé que "le président Chávez est aujourd'hui le leader dans le monde qui nous incite a prendre cette mission au sérieux. Je l'en félicite et exprime ici le remerciement, de la part des pauvres du Bangladesh, au peuple vénézuélien et particulièrement aux pauvres du Venezuela, pour que nous puissions nous donner la main et créer un monde complètement neuf."

Il a signalé durant son discours avoir "invité le président Chávez à venir nous rendre visite au Bangladesh, nous l'y attendons afin de faire passer nos idées à un niveau supérieur. Il est venu chez nous il y a de cela sept ans, pour découvrir ce que nous faisions. Avec l'intention de voir si cela fonctionnait et comment il pourrait le mettre en pratique au Venezuela. J'ai été surpris de la vitesse avec laquelle il l'a fait ici."

Combien a changé le monde

Muhammad Yunus est également auteur du livre "Vers un monde sans pauvreté", écrit en 1997. "Combien a changé le monde depuis que ce livre est arrivé entre nos mains. Et ce n'est pas tellement ce qui a changé, sinon combien de nouveaux horizons sont apparus. Parce que ce qui a commencé à changer est à peine le prélude des grands changements mondiaux qui, pour le bien de l'humanité, j'en suis sûr, arriveront dans les prochaines années" a quant à lui affirmé le président Chávez.

Le "Comandante" a qualifié la visite du Prix Nobel de la Paix de "très opportune, particulièrement en ce moment car nous sommes en train d'élaborer un ensemble de lois sur la propriété sociale, la production sociale, la distribution sociale. Ceci afin de transiter vers le socialisme, notre socialisme."


Photo : Seb pour NOTISUR

Malgré cette "transition vers le socialisme", il a de nouveau rép nété qu'ile toucherait pas à la propriété privée. "Je suis ici depuis huit ans, je l'aurais déjà fait" a-t-il rappelé. Chávez a annoncé travailler à l'élaboration d'une loi sur cette matière, via la loi "habilitante". "Nous avons commencé à transformer les entreprises capitalistes de l'Etat en entreprises sociales, afin qu'elles deviennent un instrument pour la construction du socialisme. Mais cela doit bien entendu être repris dans une loi qui établisse un cadre légal, des normes générales et par la suite les particularités."

Il a expliqué s'orienter actuellement dans "trois directions stratégiques". Celle définie ci-dessus étant la première, "transformation des entreprises capitalistes en entreprises sociales qui pourront être de propriété sociale, de production sociale ou de distribution sociale, pour la consommation et la satisfaction des besoins de la communauté."

La seconde voie stratégique sera celle des entreprises "de propriété privée collective, comme les coopératives par exemple. Les coopératives devront transiter vers la conformation d'entreprises de production sociale. Elle ne seront pas de propriété sociale mais bien de production sociale, car elle contribuent à satisfaire les besoins des communautés qui les entourent."


Photo : Seb pour NOTISUR

Et finalement, un troisième axe, celui du secteur privé. Le président Chávez a affirmé que de bonnes avancées ont été réalisées grâce au programme Fábrica Adentro, que dirige le gouvernement par l'intermédiaire de sa ministre de l'Industrie légère et Commerce, María Cristina Iglesia. "Des entreprises ont accepté la cogestion entre les patrons et les travailleurs. Et elles transitent dans ce sens. Elles vont se convertir en entreprises qui continueront d'être privées mais qui vont évoluer vers un modèle de production qui ne contribue pas seulement aux bénéfices de leurs propriétaires, mais également aux nécessités les plus ressenties de la communauté. Et surtout de la communauté proche du site où fonctionne l'entreprise. Plus l'entreprise sera grande, plus son pouvoir sera grand pour influer dans le combat contre la misère, dans le combat contre la pauvreté."

Dernièrement une association des "entrepreneurs socialistes" a vu le jour dans le pays. Jusqu'à quel point ces entrepreneurs seront-ils prêts à réduire leurs profits pour le bien de communauté? C'est là toute la question...

mercredi 2 mai 2007

Le premier mai boucle un cycle

Photo : Seb

Les festivités du premier mai ont marqué la "fin d'un cycle" cette année au Venezuela. En effet, c'est la date qu'avait choisi le gouvernement bolivarien pour clôturer la récupération complète des ressources naturelles du pays. Les entreprises multinationales qui étaient encore actives dans la vallée de l’Orénoque (British Petroleum, Exxon Mobil, Chevron Texaco, Conoco Phillips, Total et Statoil) seront désormais obligées de travailler conjointement avec l'Etat, qui sera majoritaire dans tous les contrats. Les 4000 travailleurs issus de ces entreprises seront intégrés à PDVSA, la pétrolière estatale. Cela met fin à ce que l'on appelé "l'ouverture pétrolière". Selon les autorités vénézuéliennes, l’Orénoque (du nom du fleuve qui coule dans cette valée) est la plus grande réserve de pétrole extra-lourd au monde.

Photo : Seb

Paraphrasant Marx, le président vénézuélien a invité les travailleurs à s'unir : "Travailleurs et travailleuses de tout le Venezuela, unissez-vous !" Chávez en a appelé aux directions syndicales, qu'il a fortement critiquées pour leurs divisions internes : "Certains syndicats se préoccupent pour leur petite parcelle de pouvoir et pendant ce temps la classe des travailleurs continue dans le besoin. J'appelle les directions syndicales révolutionnaires à s'unir en ce moment historique que nous vivons."

Photo : Seb pour NOTISUR

Lors de son discours de ce lundi 30 avril, le "Comandante" a annoncé plusieurs mesures sociales. Parmi celles-ci on notera l'augmentation de 20% du salaire minimum, qui passe ainsi de l'équivalent de 238 à 286 Dollars. "Un des plus élevés d'Amérique Latine" a-t-il assuré. Chávez a également promis l'extension du programme de pensions octroyées aux femmes au foyer, ainsi que la création d'un fond de protection pour personnes âgées.

Photo : Seb

Une autre initiative sera la création d'un "centre de formation socialiste pour personnes handicapées". Ceci dans le but de se mettre en accord avec la loi votée en janvier dernier et qui oblige les entreprises à employer un minimum de 5% de personnes handicapées parmi leur personnel.

Photo : Seb

Après avoir annoncé, il y a quelque jours, le paiement total de la dette du pays envers la Banque mondiale et le Fond monétaire international, le président a déclaré qu'il souhaitait "formaliser la sortie du Venezuela" de ces institutions.

Mettant l'accent sur le travail en ce premier mai, Chávez a rappelé que "l'homme ne peut pas se convertir en esclave du travail. Nous devons travailler pour vivre et non vivre pour travailler." Il a également insisté sur l'importance "du travail et de la connaissance. Deux éléments fondamentaux pour en finir avec la division entre travail manuel et intellectuel", rappelant que "la division du travail produit inévitablement le travail aliéné."

Photo : Seb

Enfin, le "Comandante" a annoncé la création d'une commission d'étude et d'activation d'une réforme de la journée de travail. "Au premier mai 2010, il faut que nous soyons capables de faire passer la journée de travail à 6 heures par jour et 36 heures semaine. Cela contribuera également a la diminution du chômage, puisque nous devrons employer plus de monde."



Creative Commons License

Les visuels et textes publiés sur ce blog sont sous
licence creative commons

Si vous souhaitez utiliser l'un de ces éléments, merci de me contacter